Chapitre 2 : Sainte Reine, vierge et martyre.
Lundi matin 7 septembre :
Et voilà c’est lundi, début des jours ouvrés, jours où potentiellement Virgil va se connecter pour me donner l’envie de venir le chercher.
Vais-je céder ?
Le week-end il ferme la boutique, de façon symbolique (j’adore quand je rime), il ne se connecte plus pour bien me montrer qu’il n’a pas la place pour me recevoir dans sa tête ou dans son slip…
Paradoxalement, bien sûr, si je traîne un peu à revenir le chercher, il bougera ses lignes et s’autorisera, ouh là là quelle folie, à répondre hors des horaires d’ouverture.
Vous l’aurez compris, Virgil est marié, et le soir, à 17h30, quand il remonte sur son vélo, il aimerait bien laisser nos ébats textuels dans son vestiaire de travail.
Parfois Virgil s’enflamme, et, il déborde, mais ses démons, sa culpabilité le rattrapent et ces petites victoires pour moi, du genre recevoir un sms à 19h42, ou durant le week-end, ne sont généralement que les signes précurseurs d’une future fuite presque orchestrable.
Comme je pourrais presque faire un prévisionnel, je me suis dit que raconter cette histoire pourrait m’aider à ne plus être dupe…
Peut-être qu’en me relisant, je verrai à quel point, Virgil n’est pas là pour moi.
A quel point, il n’est qu’une illusion, un mirage, un objet pour combler mon vide.
Il est comme les « Fast food », il comble sur le moment, mais ne rassasie pas.
Ou du moins, il ne veut pas, ne peut pas, me rassasier moi.
Et si écrire l’histoire de Virgil et Calypso rendait la fiction réelle ou la réalité fiction ?
Ça se tente...
J’ai rencontré Virgil il y a quelques années maintenant. Je pourrais dire qu’il m’a tapé dans l’œil.

Je me rends compte que ce jour-là déjà, j’ai eu conscience de la dualité du personnage, et donc sûrement de mon futur calvaire.
C’était en hiver. Il ne s’est pas présenté, il était sombre, caché sous une capuche, emmitouflé dans diverses couches qui ne laissaient apparaître quasiment que ses yeux… noirs…
Dans le contexte, je me suis demandée s’il était professionnellement du même côté de la barrière que moi, et j’ai presque prié pour qu’il ne le soit pas… ce qui aurait coupé court... mais si, il l'était…
Le film entre Virgil et Caly commence donc ce jour-là et prendra diverses formes, tantôt passionnelles, tantôt silencieuses.
Il ira même jusqu'à m'ignorer. Il bloquera mon numéro de téléphone.
Il me jurera qu’on ne l’y reprendra plus… pour se laisser convaincre à nouveau quelques mois plus tard… ou revenir me hanter, me tenter quelques années après…
Néanmoins, force est de constater que Virgil est très fort à ce jeu, me laissant toujours prendre l’initiative du repêchage et des retrouvailles.
Face à moi, il aura toujours le premier élan pour basculer à nouveau dans un échange charnel, qu’hélas ou pas, jamais je n’ai pu lui refuser.
Il est ma faiblesse, mon interminable quête, le Graal que je frôle mais que jamais je n’attrape, comme dans « Indiana Jones et la dernière croisade ».

Vous voyez cette scène où Harrison Ford va toucher la coupe ? Il a ce regard de fou, et puis il renonce, et tout bascule dans le précipice, sauf lui, qui s'en sort in extrémis...
Il est le Graal qui se laisse frôler mais jamais attraper.
Il est le savon dans la douche 😏.
J’adore les images ou les citations décalées, c’est mon péché mignon.
Peut-être que c’est ça, l’amour, inatteignable ; ne jamais le vivre vraiment, ni jusqu’au bout, pour toujours garder le désir fou.
Quel drame… ou pas ?
J’ai rêvé, j’ai fantasmé cette histoire, dont je n’ai vécu que des bribes.
Pour lui j’ai risqué tellement, j’ai pleuré, j’ai crié, j’ai fait de la magie, j’ai fait de la poésie.
J’ai sublimé mon corps et mes désirs, pour lui ou pour moi à travers lui, sans que jamais rien ne puisse s’inscrire réellement dans une construction.
J’ai tout fait pour lui…
N'y ai-je pas assez cru ?
Virgil, je le crois, met un point d’honneur à repartir à zéro dans chacune de nos retrouvailles, comme si ce Nous n’existait pas. Et pourtant deux ans et demie après, il me rejoignait encore pour faire l’amour dans les bois, à l’arrière d’une voiture.
Et pourtant, deux ans et demie après, il me disait « je t’aime au naturel ».
Mais rien ne semble rester pour lui, tout s’envole. Comme si chaque jour, chaque heure poussant l’autre, ne laissait rien de nous, rien de moi dans son sillage.
Il est ma blessure d’abandon, de rejet. Le miroir de mes alouettes, la confiance en moi chaque jour décuplée puis écrasée presque dans le même geste.
Il prendra toutes les places, en en prenant aucune.
Comment aujourd’hui puis-je être moi sans lui ? Ce qu’il a fait jaillir chez moi existe au-delà de lui, j’en ai bien conscience mais c’est à travers lui que je l’ai touché du doigt.
Dans cette sensualité qu’il a fait ressurgir, dans cette poésie que je me suis découverte, je me sublime à son contact sans que pourtant il n’ait, je le crois, jamais vraiment rien fait pour ça.
Alors j’écris pour qu’enfin, ce miroir soit en dehors de lui, en espérant que cela soit efficace pour Caly.
Es-tu revenu ?
Es-tu reparti ?
L’Éphémère… ride…